Témoignage

Témoignage de Mme Balla, personne âgée malade

11 août 2013
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Après l’interview de Zelda, 22 ans, à la fois étudiante en psychologie, stagiaire, et bénévole petits frères auprès de cette dame de 75 ans, voici, en bel écho de leurs riches échanges intergénérationnels, les paroles de Madame Balla

'' Dans toutes les cultures, il y a le pire et le meilleur. Moi, je vais vers le meilleur.  Et le meilleur, dans ma vie, là, c’est vous, Zelda, c’est les bénévoles petits frères qui m’aident à prendre en charge ma santé, c’est les salariés qui continuent à se mobiliser pour m’assurer un toit. Tout ça dans la dignité, dans le respect'' Métro Strasbourg Saint Denis : Madame Balla, nous voilà ! Nous voilà sortant du métro. Zelda me confie : ''Tu vas voir, Madame Balla adore échanger des paroles avec les bénévoles petits frères. Fine, elle aime analyser les situations auxquelles elle est confrontée – sa maladie en est une – et dégager ses ''leçons de vie'', comme elle le dit !''. Arrivées à l’hôtel  très propre et pimpant, où Madame Balla a été provisoirement logée par la Fraternité Précarité Saint-Maur, nous prenons l’ascenseur qui dessert les étages du bâtiment. Etage 2, on y est. Les murs blanc-crème de l’escalier sont décorés de quelques tableaux de peinture contemporaine, aux éclats de couleurs vives. Nous empruntons le couloir qui nous mène à la chambre de Madame Balla. Petit toc-toc-toc de Zelda sur la porte de Madame Balla : - Madame Balla, c’est Zelda ! - Oh, Zelda ! Je viens vous ouvrir ! Zelda me chuchote :' '' Malgré le fait que nous soyons dans un hôtel, nous sommes ici chez elle. Et j’ai tout de suite appris à prendre mon temps, à respecter son temps, comme celui pour elle de se lever de son lit, et de venir m’accueillir''   Au bout de quelques instants, Madame Balla nous ouvre sa porte. - Bonjour Madame Balla ! - Zelda, quel plaisir de vous voir ! Sitôt qu’elles se sont fait la bise, réciproquement ravies de se retrouver, Madame Balla m’accueille par son regard bienveillant et interrogeant. - Madame Balla, voici la salariée dont je vous avais annoncé la visite en même temps que moi. Elle travaille dans la Com, et puisque vous m’avez dit en être d’accord, elle témoignera des relations entre vous, personne accompagnée, et moi, bénévole ! - Bienvenue, bienvenue, Madame ! Asseyez-vous, là, prenez la chaise, et Zelda sur l’autre, près de la fenêtre ! Merci, Madame Balla, de votre accueil chaleureux.   ''Les enfants, je connais puisque pendant des années, j’ai enseigné !'' Zelda, attentive à éviter des efforts fatigants à Madame Balla, l’invite à s’asseoir de nouveau sur son  lit. Madame Balla le fait, en tapotant au préalable ses oreillers. Les joues roses de Zelda n’ont pas échappé à son sens de l’observation : ''Ca se voit, Zelda, que vous avez profité du soleil !'', puis elle enchaîne directement : - Comme vous le voyez, le jour, je ne reste pas en chemise de nuit. - Oui, et sur votre vêtement, les couleurs sont joyeuses et intenses ! - Ce sont les couleurs de mon pays. Ici, on dit un boubou, mais chez nous, ça s’appelle un ''kaba'' Grâce à vous, Madame Balla, déjà, en quelques secondes, nous venons d’apprendre un nouveau mot, et notre vocabulaire s’enrichit de votre culture. Madame Balla est stimulée par notre plaisir de l’écouter.  Manifestement, elle souhaite vivement se présenter, témoigner de ce qui l’a aidée à faire face à la maladie, et rendre hommage aux bénévoles et salariés petits frères - Je me présente à vous. J’ai vécu une grande partie de ma vie dans mon pays, le Cameroun.  Je suis mère de 7 enfants – 4 garçons et 3 filles -. J’ai des petits-enfants, des arrière petits-enfants. Les enfants, je connais puisque pendant des années, j’ai enseigné. Des classes, j’en ai faites au fil des années ! Dans chacune de mes classes, devinez combien j’avais d’élèves ? Vous ne trouverez jamais ! … A chaque fois, j’ai appris à lire, à écrire, à compter, à faire marcher leur cervelle, à 90 enfants en même temps ! Là, Madame Balla, vous nous épatez. Dans la foulée, vous nous racontez votre plus grande fierté : celle que vous inspire une de vos filles, diplômée en Angleterre, à Londres. Par le hasard de la rencontre de votre fille, alors jeune fille au pair, avec un couple de noirs américains qui avait remarqué son parfait anglais, elle a pu financer ses études, et elle est devenue traductrice-interprète. Oui, nous vous entendons, Madame Balla, quand vous nous précisez que pour vous, il n’y a pas de hasard. ''C’est quand on comprend et qu’on peut se représenter clairement la maladie qu’on a, qu’on peut vraiment se mobiliser pour s’en sortir''  Zelda, toujours attentive au présent, au bien-être de la personne accompagnée, demande : - Madame Balla, ça va, on ne vous fatigue pas ? - Oh non, c’est que c’est important de parler, d’être écouté, et qu’on ne vous réponde pas à côté ! Tenez, ça, j’ai toujours su le faire avec les épreuves de ma maladie. Quand on m’a annoncé le diagnostic de mon premier cancer, vraiment, je n’y comprenais rien. Alors j’ai demandé, j’ai posé toutes les questions que j’avais besoin de poser. C’est quand on comprend et qu’on peut se représenter clairement la maladie qu’on a, qu’on peut vraiment se mobiliser pour s’en sortir. Et là, maintenant, à chacune de mes radiothérapies, j’échange avec la cancérologue, avec les infirmières. Ici, c’est formidable, on est bien considéré, on n’est pas des objets. - Et souhaitons à tous les pays de se mobiliser pour préserver, et prolonger autant que se peut, la santé ! - Oh, vous savez, d’un pays à l’autre, les mentalités ne sont pas les mêmes. Par exemple, au Cameroun, quand on est malade, il vaut mieux se taire et ne pas le dire à ses voisins. Juste se confier à sa famille la plus proche. Pourquoi ? Parce que la personne malade est perçue comme un danger, comme si on était devenu une sorte de sorcière qui véhicule le malheur sur son chemin. - Mais ici aussi, Madame Balla, la maladie est souvent repoussée. Certains bien-portants préfèrent ne pas mettre un pied à l’hôpital ou fréquenter quelqu’un atteint d’une pathologie, - et cela, même quand les scientifiques ont prouvé que ce n’était pas contagieux ! - Oui, c’est vrai aussi. Après tout, dans toutes les cultures il y a le pire et le meilleur. Moi, je vais vers le meilleur. Et le meilleur, dans ma vie, là, c’est vous, Zelda, c’est les bénévoles petits frères qui m’aident à prendre en charge ma santé, c’est les salariés qui continuent à se mobiliser pour m’assurer un toit. Tout ça dans la dignité, dans le respect. * * * * * * * * * * * * * * * * * * * Lorsque nous vous avons laissée vous reposer, Madame Balla, nous vous sentions heureuse d’avoir pu autant exprimer ce qui vous définit dans votre personnalité. Et nous, nous étions heureuses de vous avoir écoutée, et de percevoir votre subtilité, celle d’une femme riche de plusieurs cultures, capable de s’exprimer avec une telle authenticité. Quelques jours après la visite-accompagnement de Zelda est arrivée une bonne nouvelle. Madame Balla : bientôt, vous quitterez la chambre d’hôtel que les petits frères vous avaient provisoirement louée, et vous intégrerez un vrai studio petits frères, avec un vrai espace pour cuisiner, vous qui connaissez des recettes culinaires de l’autre bout du monde. Et dans un autre « bout du monde », au Canada où Zelda sera pour sa prochaine année universitaire, parions qu’elle vous écrira des petits mots d’amitié, dans le maintien de ce lien humain que vous savez si bien générer.   Contact, si vous souhaitez devenir bénévole d’accompagnement de personnes malades : Marie-Liesse Lemoine, Tél : 01 48 06 45 00 accompagnementdesmalades@petitsfreresdespauvres.fr Communication Fraternité Accompagnement des Personnes Malades Maryvonne Sendra   Madame Balla, 75 ans, et Zelda, 22 ans  

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