Fabrice vient d’arriver. Debout, devant le portail d’Albert, il a encore le courrier à la main. « Je le lui monte parce qu’il ne peut plus descendre jusqu’à la boîte aux lettres. »Depuis un an, ses visites ont pris leurs rites : le courrier posé sur la table à laquelle est assis Albert qui fêtera ses 90 ans en juin prochain. « Vous êtes sûr, je vous ai appelé cette année pour vous les fêter ? » interroge Fabrice. Sourire malicieux de cet ancien percepteur des impôts. Il s’est régalé du coup de fil en tout cas. Il ne sait plus comment il a contacté l’association. « Un beau jour, j’ai vu arriver Fabrice et, comme c’était un homme de bonne compagnie, je lui ai proposé de revenir », raconte-t-il de sa voix rocailleuse née dans le sol toulousain et qui a résisté à ses installations à Paris, en Guadeloupe ou à La Réunion.Il a une tête toute ronde, quelques cheveux persistant et un air à aimer raconter des heures ses postes et ses rencontres. « Il est vif , échange sur tout ce qu’il lit et entend », explique Fabrice.Pour l’heure, il n’a pas encore trouvé de solution pour permettre à Albert, hémiplégique, de sortir en toute sécurité de la maison. Cela n’empêche pas le voyage, il prend la forme du verbe. « Grâce à La Nouvelle République et à la grammaire française, je vais pouvoir défendre mon cas aux impôts », annonce alors Albert. On accroche mentalement sa ceinture, près à se laisser guider dans le roulis de l’accent toulousain, pour entendre un nouvel épisode de sa vie. Fabrice sourit, se lève, « café ? ». Pas un mot, il sait désormais où sont les tasses, l’assiette pour les réchauffer au micro-ondes, le sucre pour la tasse d’Albert. « Ah tu m’as servi ? C’est sucré ? Merci. »Un rituel hebdomadaire qui a démarré, vraisemblablement sur un coup de fil à l’association des petits frères des Pauvres qui assure actuellement 14 visites à domicile ou en Ehpad grâce à dix bénévoles. « En général, on nous signale une personne qui pourrait apprécier de la compagnie, soit la famille ou une aide ménagère et, ensuite, on va à sa rencontre pour faire connaissance, savoir si la personne a besoin d’une visite ou s’il vaut mieux l’orienter vers une autre association pour d’autres besoins », explique Fabrice Galbert. Lui s’est lancé il y a un peu plus d’un an, en apprenant que l’association avait besoin de bénévoles. « J’ai l’impression d’être un maillon, d’apporter ma pierre à l’édifice. » Ses voyages intellectuels construisent chaque semaine un univers plus chaleureux avec ces visites. « La veille, la personne y pense, se prépare, le jour dit, on appelle pour vérifier qu’elle est bien là et, le lendemain, ce sont des conversations qui se refont. Ces visites ont leur effet dans le temps. »Celui aussi de nouer des relations où « on ne sait plus qui apporte quoi à l’autre. » Albert est de ceux-là. Ce mardi-là, comme d’habitude, il aura fait rasseoir Fabrice une petite heure, jusqu’à midi trente. La prochaine histoire, le prochain débat aura lieu la semaine suivante.Aziliz Le Berre | La Nouvelle République | vendredi 4 novembre 2016
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