« Ma seule, mon unique énergie semble sourdre de vos lettres : en pleine tempête, je m’accroche à vos mots comme à un radeau ! ». Ces mots très forts, ce sont ceux de Régis, 60 ans, détenu à la prison de Fresnes (94). Depuis 3 ans, il est accompagné par les Petits Frères des Pauvres qui l’aident à briser sa solitude. Éloigné de sa famille, ne recevant aucune visite depuis sa détention et ne sortant pas en promenade, il manque cruellement de lien social. « Cela fait 3 ans qu’il est enfermé H24 dans sa cellule. Il fait partie de ces rares détenus pour qui ne pas avoir de visiteur, c’est très dur. », explique Delphine, bénévole pour l’équipe d’accompagnement en milieu carcéral.
Avec la mise en place du confinement, les courriers se sont faits plus réguliers avec Delphine. « Depuis le 17 mars dernier, comme c’est quelqu’un d’extrêmement fragile sur le plan psychologique, on a poursuivi l’accompagnement en s’écrivant régulièrement. Je lui écris toutes les semaines. », décrit-elle.
Des conditions de détention difficiles
Les confinements successifs ont été plus faciles à gérer pour Régis, grâce à ces courriers. Mais mi-janvier 2021, l’équilibre de Régis se rompt brutalement lorsqu’il est diagnostiqué positif au Covid-19. Il est alors placé à l’isolement dans une autre cellule, située dans les étages élevés de la prison. « On l’a retiré de sa cellule et pour lui, sa cellule cela représente sa maison, sa seconde peau, son univers. Il l’a vécu comme un exil. Déplacé tout en haut de la prison, en 3e division, il m’expliquait qu’il avait une vue sur Fresnes mais que le chauffage ne montait pas jusqu’au 4e étage et qu’il était frigorifié. Les détenus testés positifs au Covid sont relégués au fond du bâtiment, tout en haut. Vulnérables, fragiles, ils sont placés dans l’un des endroits les plus sinistres et froids de la prison… », témoigne la bénévole.
« Cette cellule est un igloo. Les tuyaux de chauffage, gris aussi, sont désespérément froids. C’est pas l’Pôle Nord d’accord… n’empêche j’suis frigorifié, et quand un gars du Pas-de-Calais vous dit qu’il a froid, croyez-moi, c’est que vraiment il a froid ! Un froid qui mordille les doigts, et que mon haleine réchauffe à grand peine ! », écrivait Régis dans un courrier.
Dans cette cellule, isolé et privé de ses objets familiers, Régis n’a pour seule compagnie que les lettres de la bénévole qu’il lit et relit. « Alors, dans ce vilain cachot, quand je broie du noir, je vous lis pour reprendre espoir ; je vous lis et je reprends goût à la vie ! ».
Les courriers, une bouée de sauvetage pendant la détention
Pour Régis, les courriers de la bénévole sont d’un grand secours, c’est même ce qui le raccroche à la vie selon lui… « Moi j’vous l’dis, si je ne vous avais pas, croyez-moi, il y a longtemps que je serais passé de vie à trépas ! ».
« Dans une lettre hier, Régis me disait qu’il se serait suicidé s’il n’y avait pas eu le recours de mes lettres à lire et relire. La présence d’un bénévole, ce lien d’humanité lui est d’une grande aide. Il a déjà tenté de se suicider 2 fois avant de rencontrer les Petits Frères des Pauvres, on l’a vraiment sauvé ! », révèle Delphine.
Aujourd’hui, Régis a réintégré sa cellule. Delphine et lui continuent de s’écrire toutes les semaines. « Il prend plaisir à écrire. C’est devenu vital. Il passe ses journées à écrire parce que pour lui, c’est une façon de ne pas sombrer. Il s’est même découvert un talent d’écrivain ! », observe la bénévole.
Pour Régis comme pour les nombreux détenus que les Petits Frères des Pauvres visitent en France, les bénévoles apportent présence et écoute inconditionnelles, un lien d’humanité ténu mais essentiel.