« J’ai eu la chance de croiser la route de madame B. durant 6 mois. Durant 6 mois, je partageais ses jeudis après-midi nichées au cinquième étage dans un appartement aux allures de la maison de Blanche Neige. Au début de cet accompagnement, je n’avais aucune connaissance dans le domaine de la maladie d’Alzheimer. Les premières inquiétudes tournaient autour des souvenirs : que reste-t-il ? Ce qu’elle me raconte est-il vrai ? À quelle point la mémoire est-elle atteinte ? Se souviendra-t-elle de moi la prochaine fois, de ce que nous avons échangé ? », raconte la jeune femme, de l’équipe dédiée à l’accompagnement des personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées à Paris (75).
Pour autant, ces questionnements ne repoussent pas Emma qui poursuit son accompagnement coûte que coûte : « je crois qu’il faut accepter l’idée que cette rencontre sera rangée dans un espace-temps relationnel intangible qui n’appartient qu’à nous, au creux de la rencontre entre quelqu’un qui oubliera peut-être et quelqu’un qui se souviendra sûrement », explique-t-elle.
Le duo bénévole – personne âgée, des souvenirs à deux ?
Alors Madame B. se souvenait-elle des moments partagés avec sa bénévole ? Emma sourit : « J’ai parfois eu le sentiment que je me souvenais pour nous deux, que les moments partagés avaient teinté et modelé ma façon d’être et de faire avec Madame B. et qu’en quelque sorte, semaine après semaines, je lui rappelais ces heures d’échanges à travers l’ajustement de mon comportement. ».
Ce que retient Emma de son accompagnement ? Comme les autres bénévoles de cette action, elle a appris à savourer le moment présent… « J’ai appris doucement à pouvoir lâcher prise du passé et du futur, en me saisissant de l’instant présent. Pour certains, cela représenterait une philosophie de vie. Je pense que dans ce cas-là, c’est davantage une nécessité pour être au plus juste et au plus proche de ce que peut vivre la personne accompagnée. Mes plus grandes joies et beaux moments partagés avec Madame B. furent d’une spontanéité et d’une simplicité déconcertante ! » précise-t-elle.
Alors quel est le secret pour apprendre à savourer l’instant présent ? Emma dévoile… « J’ai souvent entendu que les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer étaient « dans leur bulle », mais il n’est pas impossible de les y rejoindre le temps d’une visite, autour d’un coloriage par exemple. Madame B. me parle aussi du ciel bleu et de la capacité que ce dernier a à la fasciner… »
Après quelques mois passés aux côtés de Mme B, Emma rencontre ensuite Mme L, éprise de poésie et de jolis mots qu’elle récite par cœur. Ce qui fait dire à notre jeune bénévole qu’ « une seule conviction demeure désormais : surprenants parfois, tendres toujours, les accompagnements auprès de personnes de la maladie d’Alzheimer appartiennent, à mon sens, à leur propre espace-temps. »
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